Midi-Pyr%C3%A9n%C3%A9es

Huit sifflets de la collection du MuCEM pourraient venir de Midi-Pyrénées. La production de Cox (Haute-Garonne) est représentée dans la collection du musée par cinq sifflets dont quatre à l’attribution incertaine, et il a été choisi d’attribuer trois autres sifflets à la Gascogne sans plus de précision.

Les sifflets en terre cuite de Midi-Pyrénées conservés jusqu’à nos jours sont peu nombreux, pourtant la production ancienne était abondante en Gascogne et en Lauragais. Il existe dans la région de nombreux témoignages sur leur vente à l’occasion de journées spécifiques dans plusieurs communes.

En revanche, il n’a pas été trouvé de mention sur leur fabrication dans les Pyrénées centrales ou dans l’Albigeois.

L’histoire

Peu de découvertes attestent d’une production ancienne de sifflets en terre cuite dans la région. Seul un sifflet tubulaire de la fin du xve ou du début du xvie siècle, sans doute destiné à être inséré dans un sifflet à eau, a été trouvé à Albi. Compte tenu du grand nombre de fêtes et foires aux sifflets ou aux coucous de la région, nul doute que des fouilles archéologiques futures ne viennent combler ce manque.

Les lieux de production

Origine incertaine

Trois sifflets du MuCEM de la fin du xixe siècle sont des « coucous » en terre vernissée. Leur attribution est incertaine. Le plus ancien entré dans les collections du MET a été attribué par son donateur à Saint-Papoul (Aude). Ils ne correspondent pas cependant à la description des roussignols produits dans ce centre (cf. Languedoc-Roussillon).

Ces sifflets ont été surmoulés dans les années 1930 et produits en grès blanc moucheté de couleurs variées à Cox. On peut penser que les sifflets anciens étaient produits dans un des centres de Gascogne. Les foires aux sifflets sont nombreuses dans la région et on pense naturellement à la fête dal coucut de Lafenasse dans le Tarn.

Leur attribution ancienne à Saint-Papoul trouve sans doute son origine dans la couleur orangée de la glaçure sur la terre rouge qu’on retrouve sur beaucoup de ces sifflets. Cette glaçure est effectivement celle de la poterie de Saint-Papoul mais elle est aussi la caractéristique de nombreux centres potiers du Sud. La majorité de ces sifflets sont cependant réalisés en terres mélangées rouge et blanche, ou en terre blanche et vernissée en orangé ou en vert. Les coucous ont le plus souvent un seul trou de jeu, mais certains en possèdent jusqu’à sept, permettant de jouer des mélodies simples.

Marguerite Vidal, en 1960, présentant la céramique du Tarn-et-Garonne1 cite « les pots à tisane et cafetières marbrées de Cox, Auvillar et Beaumont de Lomagne [...]. Les plus anciens, à fine veinules polychromes sur fond jaune d’ocre ; les plus récents plaqués de brun ou vert vif sur jaune pâle imitant les Vallauris ; et les jouets rustiques : ménages miniatures pour les filles ; tirelires, appeaux : “rossignols” et “coucous” pour les garçons ; jouets qui faisaient prime sur les champs de foire de Lomagne et de Quercy : las ferias dels coucuts, mais sont devenus introuvables [...]. »

Tirelires et coucous en terres mélangées, Gascogne ? Coll. particulière. © Pierre Catanès

Ill. 1 : Tirelires et coucous en terres mélangées, Gascogne (?)
Coll. particulière. © Pierre Catanès

Les attributions faites par Marguerite Vidal à Auvillar sont le plus souvent abusives mais on peut constater qu’effectivement, ces sifflets se rapprochent de tirelires et de sifflets à eau réalisés avec la même technique (ill. 1). Ont-ils été produits à Cox ou à Beaumont-de-Lomagne (Tarn-et-Garonne) ? Dans les années 1880, l’important atelier Belloto (30 ouvriers en 1876-1880) de Beaumont-de-Lomagne réalisait de la faïence brune (Albisola rougeâtre), jaune (comme celle de Castres) et marbrée2. Faut-il voir là l’origine de cette production ?

La difficulté d’attribution de ces sifflets est encore augmentée par la présence, dans les catalogues de vente de poteries d’autres régions du début du xxe siècle, de sifflets moulés de forme semblable, comme par exemple chez Frachon à Saint-Vallier dans la Drôme. La forme légèrement différente de ces sifflets et les glaçures permettent cependant d’exclure cette attribution, mais il est possible que d’autres usines de céramique de la Drôme aient produit des modèles proches.

À côté de cette fabrication dont l’attribution restera sans doute longtemps incertaine, les productions d’autres centres potiers de la région sont mieux connues et en particulier celles de Sémézies-Cachan (Gers), non représentée dans la collection du MuCEM, et celle de Cox (Haute-Garonne).

Sémézies-Cachan (Gers)

Sémézies-Cachan est un centre dont la production de sifflets est bien décrite, même si peu de sifflets de ce village ont été conservés étant donné qu’elle s’est arrêtée à la fin du xixe siècle.

« La caractéristique de la poterie de Sémézies-Cachan est dans la variété des ustensiles sortis des ateliers, et aussi dans l’émail opaque composé d’oxyde de plomb et d’étain. Vases, cruches de grandes dimensions, ustensiles de cuisine, sifflets de formes bizarres, représentant des chevaux, des cavaliers, des oiseaux, des dragons grossièrement façonnés et capricieusement traités en dehors des règles de l’art et du goût. Ces sifflets produisent des sons discordants, qui modulent depuis les sons les plus graves jusqu’aux plus aigus et imitent le cri du coucou, ce qui leur a fait donner ce nom. L’on a fabriqué ces sifflets de tout temps. On employait à cet usage de l’argile extraite du sol local ; on les fabriquait en grand nombre à l’occasion de la fête de Saint-Cérat, et on les vendait à Saintes lors du fénétra, les lundis de Pâques et de Pentecôte3. »

Cette description donnée en 1908 par M. Palanque peut laisser penser à une production grossière, fait contredit par un sifflet conservé en collection privée représentant un couple de paysans à cheval et sans doute réalisé vers 1830. Les personnages sont représentés de façon naïve et expriment bien une certaine image de l’art populaire, mais il ne s’agit en rien d’une production grossière. Un modèle semblable, lui aussi en collection privée, laisse penser que ce modèle n’était pas unique mais réalisé en nombre avec simplement quelques variantes, comme dans les autres centres potiers.

Des renseignements recueillis en 1944 auprès de M. Saint-Martin, maire de Simorre (Gers), lieu de vente de ces sifflets, permettent de mieux connaître leurs auteurs. J. Descamps a recueilli quant à lui ce témoignage très complet (publié en 1975). Il a semblé utile de le reproduire en partie car il permet d’avoir une bonne connaissance de l’importance de cette production ainsi que du mode de fabrication, dans un petit centre potier :

« La fabrication des sifflets se faisait à Cachan et s’exerçait dans plusieurs familles sans que des bâtiments spéciaux fussent affectés à cet usage. Elle avait lieu dans la maison familiale. Les femmes exécutaient ce travail pendant l’hiver. Les objets préparés par leur soin étaient cuits dans des fours à poterie. En 1860, deux sœurs, appartenant à la famille Duprat, étaient devenues très habiles dans cette fabrication. En 1891, Justine Duprat, de Cachan, qui avait épousé Bertrand Larée, de Simorre, fabriquait environ deux mille sifflets par an, de trois dimensions, gros, moyens et petits. Elle préparait aussi : 1. Des dournetos, dournos (cruches). Les enfants y mettaient de l’eau et cherchaient à imiter, de très loin, les modulations du rossignol. 2. Des coucuts qui permettaient d’imiter fort bien le chant du coucou. Tous ces objets étaient préparés à la main, sans autre outil qu’une curéso en buis, sorte de lame terminée à une extrémité par une partie plate pour creuser à l’intérieur les objets fabriqués, y faire l’ouverture et la fente. L’autre extrémité, en forme de pointe, servait à faire un trou de chaque coté du coucut ou du sifflet. [...] Le coucut, de forme ovoïde, portait un pied avec une figurine que l’ouvrière obtenait à l’aide d’un moule en terre reproduisant une tête de pipe. Les fours de Cachan étant démolis, vers 1880, la femme Larée portait ses objets chez le potier de Saramon, pour les faire cuire. La vente des sifflets, dournetos et coucuts avait lieu au hameau de Saintes [...]. C’est approximativement en 1905 que la fabrication a dû cesser. [...] Saint-Jean-de-Luz, juin 19444. »

Chioulet trouvé à Castelnau-Magnoac et coucut de la collection Flandinette, Cachan, fin du XIXe siècle. Coll. particulière. © Pierre Catanès

Ill. 2 : Chioulet trouvé à Castelnau-Magnoac et coucut de la collection Flandinette, Cachan, fin du xixe siècle.
Coll. particulière. © Pierre Catanès

Les sifflets décrits ici sont effectivement « grossièrement façonnés » en forme d’oiseau et plusieurs exemplaires de ces petits objets ont été trouvés dans les champs ou les greniers des maisons des villages voisins. Ainsi, un sifflet trouvé dans le grenier d’une maison de Castelnau-Magnoac (Hautes-Pyrénées) (ill. 2) confirme l’importance de l’aire de participation au pèlerinage de Simorre rapportée par les textes anciens. Leur forme est ancienne car des sifflets presque identiques ont été trouvés en contexte du milieu du xviie siècle5.

Un coucou d’une collection privée possède effectivement le « pied » moulé en forme de figure mais d’autres coucous sont de forme très simple. Ainsi, un grand coucou provient de la collection de Félix Flandinette, préparateur à l’École française d’anthropologie fondée par Paul Broca (ill. 2). Celui-ci avait réuni une importante collection de sifflets à la fin du xixe siècle. Le coucou de sa collection, très patiné, permet de penser que cet objet a pu être utilisé comme appeau.

À côté de ces centres bien connus, il en est d’autres dont la production est peu référencée, tels que Revel et Martres-Tolosane.

Revel (Haute-Garonne)

Louis Bousquet (1866-1949) y fabriquait des rossignols à côté de la production utilitaire ainsi que des poteries miniatures en forme de cafetières et des aparratals, nids d’oiseau en terre cuite6.

Martres-Tolosane (Haute-Garonne)

Un sifflet en forme d’oiseau en faïence, au décor caractéristique de ce centre et daté du milieu du xixe siècle, est connu dans une collection particulière. Le sifflet, cassé, est très incomplet mais il ne fait pas de doute qu’il s’agissait d’un sifflet à eau.

Centres inconnus

Bien d’autres sifflets, réalisés avec soin ou rapidement modelés, proviennent sans doute de cette région sans qu’il soit possible actuellement de préciser leurs origines. Ainsi pouvons-nous terminer ce tour d’horizon en reprenant ce témoignage d’une fabrication qui n’a dû laisser que peu de traces, celle d’un vagabond dénommé « Courageux »7 : « N’i a mai de 75 ans d’aquô. Era un passant, sai pas d’ont venid. Avid una pôste sul cap coma aquô, coma un taîhador e i portava de passerons dessùs en tèrra jauna, en riala, en argilia se volètz. Era per ba vendre. » : « Il y a plus de soixante-quinze ans de cela. C’était un vagabond. Je ne sais pas d’où il venait. Il portait une planche sur la tête, comme un petit étalage sur lequel il mettait des petits oiseaux en terre jaune, en argile. Il les vendait. » (commune Le Verdier).

Selon certains, il s’agissait de sifflets en forme d’oiseau.

« Aqueles passerons èran crôis e i metid un bocin d’aiga e per la cua fasid un fiulèl. » : « Ces petits oiseaux étaient creux. On y mettait un peu d’eau dedans et en soufflant par la queue ça faisait un sifflet. » (commune Le Verdier).

Il trouvait la terre, entre autres, sur la commune du Verdier au lieu-dit La Viale. « Courageux » vivait de toutes sortes d’expédients, notamment de mendicité. « N’aviam un que cada an venid far las vendémias. Courageux s’apelava. Un tipe que fasid cent quilôs, benlèn mai, un ercula. Jamai la mairina l’a pas volgut far dormir dedins ni mai manjar a causa dels pesolhs. Quistava mès trabaîhava. Me pensi qu’aurid portat cent cincanta quilôs de rasims sul cap. Jamai digus a pas saput son nom. E èra un artista. Vendid de lapins e d’irondèlas en tèrra, en riala. El hô fasid. Demorava pertot e enlôc. » : « Nous en avions un qui chaque année venait vendanger. Il s’appelait Courageux. C’était un type de plus de cent kilos, un hercule. Ma grand-mère n’avait jamais voulu le faire dormir et manger dedans à cause des poux. Il demandait l’aumône mais travaillait aussi. Je pense qu’il aurait pu porter cent cinquante kilos de raisin sur la tête. Personne n’a jamais su son nom. Et c’était un artiste. Il vendait des lapins et des hirondelles en argile qu’il fabriquait. Il habitait partout et nulle part. » (commune de Vieux).

Les formes

Un des types de sifflet produits par tous ces centres est celui des dournetos, sifflets à eau en forme de cruche. Peu d’exemplaires conservés peuvent être attribués avec certitude à la région. Les cruches présentes dans les musées viennent majoritairement de Provence ou de la vallée du Rhône et ont dû, lors des foires, succéder aux sifflets de production locale après la fermeture des centres potiers de la région.

On rencontre également dans le Sud-Ouest des sifflets moulés ou tournés en forme d’oiseau (ill. 3) mais il est difficile actuellement de leur attribuer une origine précise. Peut-être viennent-ils aussi des régions voisines ?

La forme ovoïde peu complexe, parfois simplement étirée pour accentuer l’aspect aviforme de l’objet, est en revanche beaucoup plus caractéristique de la région (ill. 4). Même les sifflets en forme de cavalier de Cachan sont produits sur ce modèle, le cheval étant ajouté sur le sifflet.

Cela vient sans doute de leur usage comme appeaux, comme on le lira ci-dessous.

Sifflets à eau (jaune et orangé) et globulaire (marron), Sud-Ouest ?, vers 1900. Coll. particulière. © Pierre Catanès

Ill. 3 : Sifflets à eau (jaune et orangé) et globulaire (marron), Sud-Ouest (?), vers 1900.
Coll. particulière. © Pierre Catanès

Sifflet globulaires modelés, Sud-Ouest, XIXe siècle. Coll. particulière. © Pierre Catanès

Ill. 4 : Sifflet globulaires modelés, Sud-Ouest, xixe siècle.
Coll. particulière. © Pierre Catanès

La vente : les jours et foires des sifflets

Les foires aux sifflets ont été signalées depuis longtemps par les folkloristes puis par les ethnologues de la région.

Une des mieux documentées est le heyro dous chioulets (« foire aux sifflets ») de Simorre (Gers) où se vendaient les sifflets de Séméziès-Cachan. Cette fête est présentée dans le texte « Le sifflet, usages et symboles ».

La fête du Mas-Grenier (Tarn-et-Garonne) est connue pour la vente des coucuts qui provenaient de Cox. Félix Mathieu, ancien président de la Société des Toulousains de Toulouse, nous en donne une description très vivante :

« C’est à la fête votive du Mas-Grenier que les coucuts faisaient le bonheur des jeunes. Ce jour-là, la corporation des potiers de Cox au complet, nantis de provisions et de flascolos de vin, prenait de grand matin le chemin du sanctuaire de Saint-Jean. Dans cette occasion, on pratiquait une sorte de braderie potière et, dans toutes sortes de véhicules, s’entassaient de multiples poteries de rebut, voilées ou noircies par excès de cuisson : la terraille en un mot. Après une courte dévotion à la fontaine de Saint-Jean dans laquelle on jetait des sous, la longue file des potiers s’alignait dans les rues de la ville, étalant sa terraille et ses coucuts. À l’issue de cette braderie dont on devine l’assourdissante cacophonie, nos potiers brisaient tous les invendus et, à la nuit, reprenaient le chemin de Cox, non sans avoir vidé force flascolos 8. »

D’autres fêtes où se vendaient ces coucous sont signalées en 1963 lors de l’exposition sur les sifflets au musée du Mans :

« Ils étaient vendus les jours de marché comme à Soufflenheim [Bas-Rhin] ou à Bonnetable [Sarthe], les jours de foire comme à Cox ou à Sérignac (près de Beaumont-de Lomagne, Tarn-et-Garonne) le lundi de Pentecôte à la célèbre foire des coucous « Feiro dels Coucuts », à la fête du Saint-Patron : Saint-Martin à Verdun (Tarn-et-Garonne), Saint-Jean au Mas Grenier (Tarn-et-Garonne), Saint-Cérats à Simorre... et aux fêtes foraines comme le remarque G. Vuillier 9. »

Comme on le voit, Mas-Grenier n’est pas le seul lieu de Tarn-et-Garonne où ces ventes de coucous étaient traditionnelles.

Dans le Tarn, ces sifflets étaient vendus à Saint-Lieux-Lafenasse près de Réalmont à la fête dal coucut (« du coucou ») qui se tenait le lundi de Pâques10 et à celle de Castres en août où se vendent encore lors du fério dels chioulets (la « foire des sifflets ») des sifflets en plastique qui ont succédé à des sifflets en céramique importés de Chine dans les années 1970, remplaçant sans doute eux-mêmes la production locale11. Malheureusement pour ces dernières foires, nous ne savons pas de quel centre potier provenaient les sifflets.

 Il est certain, au vu de ces quelques témoignages, que la vente des sifflets en terre cuite a été très importante dans toute la région de Gascogne.

La forme très simple de beaucoup de ces sifflets peut s’expliquer par leur usage également comme appeaux en dehors de ces fêtes. En 1844, est ainsi donné pour tout le département de Haute-Garonne la faculté de chasser :

« [...] 2. Les alouettes et ses analogues [...] avec des nappes et appeaux ou sifflets, depuis le 1er septembre jusqu’au 1er février ; 3. Les petits oiseaux quelconques avec des nappes, appeaux ou sifflets, et encore avec des gluaux, depuis le 1er septembre jusqu’au 1er février ; [...]12. »

S’agissait-il de sifflets en terre cuite ?

Cox

Cinq sifflets de la collection du MuCEM sont attribués à Cox, village dont l’activité potière est connue depuis la fin du Moyen Âge.

Un sifflet a été acheté en 1944 par Lucien Brunet avec d’autres poteries et de l’outillage de potier, collectés dans la Tarn et à Cox. Ces objets ont été mis en dépôt au musée Dupuy de Toulouse.

Les quatre autres sifflets sont de provenance diverses. Moulés en forme d’oiseau, ils reprennent la forme des sifflets en terre vernissée de la fin du xixe siècle attribués ici à la Gascogne, mais l’origine est également incertaine. Réalisés en grès blanc et couverts d’une glaçure mouchetée de vert ou marron, leur relief est effacé comparé aux sifflets de terre cuite et leur taille légèrement inférieure. Il est probable qu’ils proviennent d’un surmoulage des sifflets anciens. L’origine de deux de ces sifflets n’est pas précisée ; un a été acheté à Antibes et le dernier à Simorre (Gers) par M. Dastarac lors de la fête de Saint-Cérats, mais ce dernier précise que : « C’est ainsi qu’à défaut d’artisans locaux les menus objets de poterie sont recherchés dans un atelier de la Haute-Garonne (Cox. Canton de Cadours). »

Coucut, Cox, fin du XIXe siècle. Coll. particulière. © Pierre Catanès

Ill. 5 : Coucut, Cox, fin du xixe siècle. Coll. particulière. © Pierre Catanès

Il a donc été choisi d’attribuer cet ensemble à Cox. Ce village où la poterie était déjà présente à la fin du Moyen Âge a connu une très importante activité potière à partir du milieu du xvie siècle, et ses poteries se vendaient dans tout le midi de la France. Après un déclin dû à la concurrence de la faïence, la production se développe de nouveau au xixe siècle et le nombre d’ateliers augmente jusqu’à trente-six en 1880 avant de décliner sous l’effet de la concurrence de Vallauris. La dernière poterie ferme en 1952. Ce centre potier fait aujourd’hui l’objet de nombreuses recherches et d’une prospection thématique des anciens ateliers13.

À côté de ces sifflets tous réalisés dans les années 1930, les sifflets traditionnels de Cox sont bien mieux connus. Modelés en terre cuite non vernissée, ils sont généralement agrémentés d’un décor sommaire tracé à l’engobe blanc (ill. 5). Au début du xxe siècle, le potier Bosc était connu pour ses coucous et rossignols en terre cuite zébrée de traces d’engobe blanc. Félix Mathieu écrit que l’ancien potier Bosc lui avait raconté comment, aux veillées d’hiver, les potiers aidés des femmes et des enfants en modelaient un grand nombre. Après dessiccation et bariolage d’engobe, on en remplissait de vieilles oules [marmites sans anse] qu’on posait sur le sommet des fours pour leur cuisson14. Leur production était aussi réalisée dans les hameaux de Bandarra, Le Buisson, En Gindre et Roudouly15.

On constate effectivement des formes variées plus ou moins allongées dans ces sifflets évoquant des fabricants différents.

D’après un exemplaire conservé au musée de cette localité, les rossignols produits semblent avoir eu une forme de petite cruche sur piédouche à anse supérieure en panier et petite anse latérale arrière en terre vernissée.

1 Marguerite Vidal, « La céramique au musée de Moissac », Art populaire de France. Recueil d’études, Strasbourg, Éd. Européa, 1960, p. 137.

2 Alain Costes, Approches de la poterie du Midi toulousain et de la Gascogne (xvi-xxe siècle), La Grèsale, hors série n1 – seconde édition, GRECAM Rieumes, juillet 2000, p. 147-148.

3 Ch. Palanque, « Notes sur quelques faïenceries du Sud-Ouest », Bulletin de la Société archéologique du Gers, IXe année – 1er trimestre, Auch, Impr. Léonce Cocharaux, 1908, p. 37.

4 J. Descamps, « Fabrication de sifflets en terre cuite ou “coucous”, à Sémézies-Cachan », Revue de Comminges, 1975, p. 225-226.

5 Renseignement communiqué à l’auteur en 2002 par Alain Costes, ethnographe-archéologue, membre du GRECAM (Groupe de recherche en Ethnographie, Céramologie et Archéologie en Midi toulousain).

6 Yves Blaquière, « Notes sur les potiers du Sorèzois et du Revèlois », Bulletin de la Société de recherches spéléo archéologiques du Sorèzois et du Revèlois, no 12 - année 1974-1978, p. 25-35.

7 Daniel Loddo, Entre Còrdas e Gresinha [entre Cordes et Grésigne]. Cantons de Castelnau-de-Montmirail, Cordes et Vaour (Tarn), Cordes, C.O.R.D.A.E La Talvera, 1997, p. 153.

8 Félix Mathieu, Notes sur la céramique de Toulouse et du Sud-Ouest, numéro spécial de « L’Auta », Toulouse, 1965, p. 69.

9 Raymond Blanc (préface), Deux potiers de Prévelles, cat. exp. Le Mans, Musée du Mans,1963.

10 Robert Jalby, Le Folklore du Languedoc, Paris, G.P. Maisonneuve et Larose, 1971, p. 156.

11 Renseignement communiqué à l’auteur en 2003 par Alain Costes, ethnographe-archéologue membre du GRECAM (Groupe de recherche en Ethnographie, Céramologie et Archéologie en Midi toulousain).

12 Séance du 30 août 1844 du Conseil Général du département de la Haute-Garonne.

13 Jean-Michel Lassure, « L’atelier de potiers Laffont à Cox (Haute-Garonne) », Mémoires de la Société archéologique du midi de la France, t. LXIV, 2004, p. 203-219.

14 Félix Mathieu, op. cit., p. 69.

15 Adrien Lesur et Tardy (pseud. de Henri-Gustave Lengellé), Les Poteries et les Faïences françaises, 1re partie, Paris, Tardy, 1957. Note de l’auteur : l’orthographe erronée des hameaux de Cox indiquée dans le Lesur et Tardy a été rectifiée dans le texte. De plus, Le Buisson, indiqué dans cet ouvrage comme un hameau de Cox, est un quartier de la commune voisine de Puysségur.