Hongrie

Un seul sifflet représente la production hongroise dans la collection du MuCEM. Il a été collecté en 1996 (coll. DMH1997.17). La production de sifflets en terre cuite est peu documentée pour la Hongrie où pourtant la poterie populaire a été très importante et variée.

Historique

Deux sifflets en terre cuite en forme de cheval ont été mis au jour dans l’est de la Hongrie. Leur corps allongé forme la flûte selon une technique connue dans la Roumanie voisine. Un de ces sifflets a été trouvé au centre ville de Szarvas (comitat de Békés) dans l’ancien fossé de la forteresse. Il pourrait être daté du xviie siècle. L’autre provient de Tószeg, village du comitat de Jász-Nagykun-Szolnok, au centre de la Hongrie. À cet endroit, une agglomération de l’âge du bronze a été découverte, ce qui a conduit à le dater de cette période. Pour Péter Király1 qui a étudié les sifflets en Hongrie, sa ressemblance avec le premier sifflet doit conduire à le dater également de l’époque moderne. L’exemple de la Roumanie, qui a livré un sifflet du Néolithique semblable aux sifflets modernes, incite à la prudence. Ce sifflet pourrait être le témoin d’une production très ancienne et d’ailleurs avérée par d’autres découvertes.

D’autres sifflets à eau en forme d’oiseau peuvent être datés du xve au xviie siècle. La flûte est insérée directement dans le dos de l’oiseau comme il est encore d’usage pour les sifflets à eau de Corund en Roumanie. Ce village est considéré comme un des centres potiers de la céramique hongroise de Roumanie, habité par des potiers de la minorité hongroise.

Centres de production

Dans le sud du pays, près de la frontière croate, la manufacture de porcelaine de Zsolnay à Pécs (région de Dél-Dunántúl) a produit de nombreux sifflets à eau en forme de cruche, et certains des pichets de la production de cette manufacture ont un petit oiseau-sifflet posé sur l’anse.

À l’opposé de cette production raffinée, un potier traditionnel, Sebestyén Gerencsér (1898-1955), qui obtint en 1954 le prix du « maître de l’art populaire », produisait à Siklós, en Transdanubie méridionale, des pichets et de nombreux sifflets à eau au corps tourné sur piédouche à tête de taureau (le gyűdi bika, « taureau de Gyűdi ») ou à tête de coq. Ils étaient destinés à l’important et très ancien pèlerinage marial de l’abbaye de Máriagyűdi toute proche2.

Chandelier orné de deux figurines reproduisant des modèles de sifflets, Sebestyén Gerencsér, Siklós, 1934. Marseille, MuCEM (DMH1937.64.115). © MuCEM

Ill. 1 : Chandelier orné de deux figurines reproduisant des modèles de sifflets, Sebestyén Gerencsér, Siklós, 1934.
Marseille, MuCEM (DMH1937.64.115).
© MuCEM

Si le MuCEM ne possède pas dans ses collections ces sifflets, on trouve en revanche un chandelier (gyertyatarto) (DMH1937.64.115, ill. 1) sans doute produit par Gerencsér, car il est orné de deux figurines identiques aux modèles de sifflets qu’il fabriquait. L’objet, produit à Siklós, a été recueilli par Mlle Champart en décembre 1934, qui l’a donné avec une importante collection d’objets hongrois. Le « taureau » est muni de deux trous sur le dos et pourrait être un sifflet, mais cet objet n’a pu être étudié dans le cadre de ce catalogue pour vérifier ce fait. La donatrice précise que ce chandelier n’est pas populaire et que les deux animaux existent séparément comme sifflet, fait confirmé par la présence de tels sifflets de ce potier dans les collections du Janus Pannonius Museum à Pécs3.

Dans le nord du pays, à la frontière avec la Slovaquie, c’est dans la région de Győr-Moson-Sopron, que Lajos Völcsey produisait encore à Dör, au xxe siècle, des sifflets à eau en forme d’oiseau sur piédouche proches des productions slovaques anciennes4.

D’autres modèles existent en Hongrie, comme des sifflets à eau en forme de simple vase décoré de fleurs stylisées, ou de petits sifflets en forme d’oiseau en faïence de la fin du xixe siècle5. La production hongroise a sans doute été importante mais a décliné fortement au xixe siècle quand toute la poterie traditionnelle hongroise a connu une grave crise, qui a entraîné la fermeture de nombreux ateliers.


Il reste cependant aujourd’hui quelques céramistes qui continuent la production de sifflets. Plusieurs sont installés à Budapest. Le cserépsíp (« sifflet en poterie ») présent dans les collections du MuCEM témoigne de cette fabrication contemporaine. Aucune indication ne précise son lieu de production exact.

1 Péter Király, « Tongefäβflöten aus ungarischen Ausgrabungen », Volkskunst 7, 1984/3, München, 1984, p. 45-49.

2 Hungarian Ethnographical Museum (collectif), Hungarian decorative folk art, Budapest, Ed. Corvina, 1954, notices et illustrations 52 et 53.

3 No inv. 55.16.31.

4 Hungarian Ethnographical Museum, op. cit., notice et illustration 54.

5 De tels sifflets sont présents dans les collections du Neprajzi Muzeum de Budapest (musée d’Ethnographie).